Copyright photographie : J.D. Okhai Ojeikere
Dans l’histoire de l’humanité, les cheveux ont toujours été bien plus qu’un simple attribut physique. Ils portent en eux des récits d’identité, de culture, et parfois même de résistance. Pour les personnes d’ascendance africaine, en particulier, les cheveux crépus ont été au cœur d’un voyage complexe à travers le temps, lié à l’histoire de l’esclavage.
Vous ne le savez peut-être pas, mais les cheveux crépus ont même eu un rôle important dans l’échappée d’esclaves.
Les cheveux crépus, une texture unique
Les cheveux crépus, avec leur texture unique et leur abondance de boucles serrées, ont été un élément central de l’identité des personnes d’ascendance africaine depuis des siècles. Cependant, pendant la période sombre de l’esclavage transatlantique, les cheveux crépus sont devenus bien plus qu’une simple caractéristique physique. Ils sont devenus un outil de domination et de déshumanisation.
Les esclaves africains étaient souvent dépouillés de leur dignité et de leur identité culturelle dès leur capture. Leurs cheveux, qui étaient auparavant traités avec soin et considérés comme un symbole de fierté et de connexion communautaire, ont été transformés en un moyen de contrôle. Les esclavagistes exigeaient souvent que les cheveux des esclaves soient rasés pour les priver de leur identité et de leur individualité.
La lutte des esclaves pour protéger leur identité
Cependant, même dans les conditions les plus brutales, la créativité et la résilience des individus ont persisté. Les femmes esclaves ont trouvé des moyens ingénieux de maintenir leur héritage capillaire malgré les tentatives de suppression. Elles ont utilisé des tissus, des foulards et des coiffures protectrices pour protéger leurs cheveux et maintenir une connexion avec leur culture et leur identité. Mais ce n’est pas tout !
Le rôle des cheveux crépus dans l’esclavage : les cheveux tressés comme des cartes
Les cheveux crépus ont joué un rôle crucial dans la lutte pour la liberté et la dignité. Les esclaves s’échappant souvent dans des zones reculées ou des marécages, les coiffures complexes ont été utilisées comme cartes codées, indiquant des chemins vers la liberté ou des lieux sûrs.
En effet, les “tresses racines” attachées au cuir chevelu, ont toujours, dans différentes cultures africaines, permis de communiquer des messages : statut social, état matrimonial, religion…
Des femmes esclaves ont alors décidé d’utiliser le tressage comme un code secret pour indiquer des chemins par où s’échapper.
Les femmes planifiaient les évasions en dessinant des cartes, par les tresses.
Une tresse enroulée désignait une montagne, une tresse sinueuse (en serpent) renvoyait à une source d’eau, une tresse épaisse indiquait la présence de soldat. Le parcours se lisait depuis le front (d’où les esclaves se trouvaient) à la nuque (où il fallait fuire). Des points de rencontre étaient aussi indiqués lorsque plusieurs rangées de tresses convergeaient en un même endroit.
La sociologue Lina María Vargas (informée par Leocadia Mosquera, enseignante à qui sa grand-mère avait appris le secret des coiffures), explique par exemple que s’il fallait se rencontrer sous un arbre, la tresse serait terminée verticalement et vers le haut pour qu’elle tienne debout. S’il fallait se rencontrer à la rive d’un fleuve, la tresse était aplanie dans le sens des épis.
Les cheveux tressés permettaient également de cacher des objets de valeur qui leur seraient utiles : des allumettes, des grains de riz, des grains d’or, des graines à cultiver…
Aujourd’hui, alors que nous célébrons la beauté et la diversité des cheveux crépus, il est essentiel de reconnaître l’histoire complexe derrière chaque boucle. Les cheveux crépus portent les traces de lutte, de résilience et de survie de générations d’ancêtres. Ils représentent la force d’une communauté qui a surmonté l’adversité avec grâce et dignité.
Les cheveux crépus sont bien plus qu’une simple texture : ils sont symboles de résilience et de force, ont servi de lien avec l’héritage africain et ont incarné la résistance contre l’oppression.